Historique
Même si les abords du "mont Chaibeux" (Montchaibeux) ont vraisemblablement été une terre d'accueil depuis la nuit des temps, certaines études ont permis d'affirmer que les premières constructions, à savoir notamment un lieu fortifié romain (oppidum), dateraient de l'époque mérovingienne, c'est-à-dire aux alentours de l'an 500.
Ce n'est qu'environ 350 ans plus tard, en 866, qu'il est officiellement fait mention de Courrendlin, alors appelé Rendalana Corte, dans l'acte de confirmation des biens de l'abbaye de Moutier-Grandval par le roi Lothaire.
Au fil du temps, ce Rendelana Corte est devenu Courrendlin (1179) puis Corrandlain ou Rellendorf (1184), Rennendorf (1285), Corrandelinim (1438) et Curraldin, Correndlin (1461) avant de reprendre et de garder jusqu'à aujourd'hui l'appellation de 1179.
Mais Courrendlin ne fut pas toujours le paisible village de 2500 habitants que nous connaissons.
En 1486, à la suite d'un litige à propos de l'élection du prévôt de Moutier, les Bernois attaquèrent la Prévôté, dont Courrendlin faisait partie à l'époque, et s'en emparèrent.
Toute la Suisse fut émue devant un tel coup de force de Berne contre un allié, l'évêque de Bâle. Les Bernois ne lâchèrent prise qu'après avoir contraint la Prévôté à signer un traité de combourgeoisie avec Berne, ce qui leur permettait d'imposer leurs doctrines de force.
Ces rapports régis par la violence et non par le droit, portaient atteinte à la souveraineté de l'évêque de Bâle et furent à l'origine de nombreuses tensions.
Cette combourgeoisie avec Berne était donc mal acceptée de la part de la Prévôté. Eurent alors lieu une suite de conflits interminables entre Berne et l'évêque de Bâle. Courrendlin fut notamment incendié, de même que plusieurs villages des alentours.
Un autre épisode a également marqué la vie des Pieutchais, il s'agit des événements de la Révolution de 1789.
En 1792, les troupes françaises envahirent l'ancien évêché de Bâle et s'arrêtèrent à Courrendlin. Des tentatives eurent alors lieu afin de rallier la Prévôté au nouvel Etat. Courrendlin devint le siège de l'assemblée des communes qui était chargée de créer une République jurassienne et dont le but était de conserver l'ancienne Constitution, en d'autres termes, de refuser la participation à la Révolution.
Furieux de ce refus, les révolutionnaires menacèrent alors de piller le village et de le brûler. Les croix des cimetières furent renversées et on annonça bientôt un massacre général.
Mais c'était sans compter sur la réaction de Courrendlin qui rassembla près d'un millier d'hommes afin de résister à un éventuel assaut, ce qui découragea les Français qui voulaient éviter un affrontement sanglant.
Courrendlin ne fut dès lors plus inquiété jusqu'en 1797, année de l'invasion des cantons suisses. La Prévôté fut alors le premier pays à être réuni à la France (1798) et fit partie du département du Mont-Terrible.
L'histoire a toujours fait de Courrendlin une sorte de tampon entre 2 parties du Jura. Bien qu'ayant appartenu à la Prévôté, le village de Courrendlin a toujours tenu à conserver sa religion catholique.
C'est ainsi que, dès les rebondissements concernant la question jurassienne en 1947, Courrendlin a dû se décider à prendre part pour l'un ou l'autre camp.
Jusqu'au 23 juin 1974, jour du plébiscite, les opinions étaient restées assez partagées, ce qui s'explique notamment par la forte proportion de résidants de souche alémanique.
A trois reprises, Courrendlin dut se prononcer à ce sujet et, avec plus 90% de participation à chaque fois, le "oui" l'a toujours emporté.
Après avoir été dans le district de Moutier, Courrendlin a donc fait son entrée dans la République et canton du Jura et fut rattaché au district de Delémont.
Impossible d'évoquer ce village et son histoire sans parler des divers monuments qui s'y trouvent et notamment de la Vieille Eglise, appellée également église St-Barthélémy.
Classée monument historique par la Confédération, elle date des années 700 ou 800. Cet ancien sanctuaire restauré il y a un peu plus d'une trentaine d'années (1975/76) contient en effet des fresques de haute valeur historique comme la pierre dite "Pierre de Saint Germain". Selon la légende, cette épaisse dalle de calcaire porterait les marques des genoux du martyre Saint Germain et aurait – paraît-il – guéri les rhumatismes des personnes qui s'y seraient agenouillées.
Dédiée à l'origine aux saints Germain et Randoald martyrisés en 675 au sud de Delémont, l'église paroissiale actuelle, construite en 1756, a remplacé la Vieille Eglise.
Rénovée récemment, elle fut autrefois saccagée par un ouragan. Cette catastrophe naturelle, survenue le 23 septembre 1923, détruisit la flèche de l'église, ce qui engendra de fortes dépenses pour la réparer.
Elle permit pourtant de mettre la main sur des documents historiques qui étaient cachés dans cette même flèche.
Une autre catastrophe a marqué la vie des citoyens de Courrendlin.
En effet, le 19 août 1949, un important incendie s'est propagé au centre de la commune. Tout fut mis en œuvre pour éviter de voir le "vieux Courrendlin" réduit en cendres. Mais, malgré l'acharnement des pompiers ,six maisons furent brûlées laissant une trentaine de personnes sans abri.
Heureusement, aucune victime ne fut à déplorer si ce n'est quelques têtes de bétail.
Terminons avec une touche de mystère: la Tour.
Etablie au centre du village, son origine reste inconnue. Le mystère demeure, malgré les recherches effectuées par différents historiens.
Pour certains, l'éloignement de l'ancienne église paroissiale expliquerait la présence de la Tour. Plus proche du centre du village, elle aurait été construite afin d'appeler les fidèles à l'office ou encore afin de faire entendre le tocsin à tous les habitants.
Pour d'autres, elle constituerait le seul et unique vestige de l'ancien château des nobles de Courrendlin.
On a aussi émis l'hypothèse qu'elle aurait pu servir de poste de douane entre la Prévôté et les états de l'évêque de Bâle ou encore qu'elle aurait fait office de geôle. Beaucoup de questions restent sans réponse en ce qui concerne cette chapelle, mais une chose est certaine: elle ne manque pas d'attirer les regards.
Céline Seuret